Et hop, une autre petite histoire pour endormir les petits eldars:
L’agri-monde de Xana-th, zone Ouest 345-B-456, village de Glam Al Nebar, par une triste après midi d’automne. Au centre du petit bourg en ruine, une maison à la façade en partie écroulée et noircie par les flammes. Au milieu des ruines, adossé à ce qui reste d’un mur, le soldat Perry fume une cigarette. Du tabac Calchedi… pense-t-il… L’odeur velouté et suave de la fumée lui fait oublier pendant quelques secondes la détresse de sa situation. Il s’accroupit, tire une dernière bouffée et jette le mégot au milieu des gravas. L’atmosphère a comme un goût de résignation. Il regarde ses mains, des mains noires, des mains de soldat, se dit-il.
Fils de cultivateur, le soldat Perry a grandi sur la planète agricole 3481. A la mort de son père, le jeune Perry, âgé alors de 16 ans, reprend l’exploitation avec l’aide de son oncle. Il travaille dur, ne ménage pas sa peine pour faire perdurer la petite entreprise familiale. Il aimait son métier. Les champs de balgours rouges, son verger d’iridoles et même un petit cheptel de vaches laitières étaient sa fierté. Il n’aurait changé de vie pour rien au monde.
C’est ce qu’il avait tenté d’expliquer au sergent recruteur, il y a 5 ans. Le sergent avait froidement répondu : « Ta vie ne t’appartient pas. Tes mains serviront l’Empereur. »… Des mains de soldats… Perry a été affecté au 103ème de Tiberiad, une division de chasseur à pied de la Garde impériale. Cela fait maintenant 3 années qu’il parcourt ce secteur du segmentum tempestus. Il fait partie d’une compagnie de soutien et logistique. Sa division est en charge de sécuriser un ensemble de planètes d’intérêt vaguement stratégique, à ce qu’il avait pu comprendre. Il s’agissait de fortifier certains astroports et petites villes d’approvisionnement. Le 103ème vérifiait, arrêtait, exécutait et réprimait toute opposition, en « Son Nom ». Des missions de routine pour une division aussi puissante. Mais des rumeurs couraient depuis quelques mois sur une menace bien plus grande que les petits groupes de rebelles indigènes ou les contrebandiers. Le haut commandement craignait une menace xénos sérieuse. De celle qui mettent des mondes entiers à feu et à sang…
Jusqu’à hier, ce n’était qu’une rumeur, une abstraction, une lointaine chimère qui faisait parler les bleus. De temps à autre, il rencontrait des gars qui revenaient d’un front quelconque et qui racontaient les tirs, les cris, le sang. Perry n’avait jamais vraiment réalisé l’horreur. Il ne s’était même jamais posé la question : contre qui devons-nous nous battre ? Les ennemis de l’Empereur évidemment, mais il y en avait tellement. Maintenant qu’il était devenu acteur, il savait. Des mains de soldat…
Ca faisait une heure que les tirs avaient cessé. Une heure qu’il était seul dans cette ruine pourrie, perdu dans ce village pourri, sur une planète de merde pourrie… Sa compagnie ? Pulvérisée, anéantie, déchiquetée. Il pleurait, il repensait à ce matin et il pleurait. Tout était allé si vite. D’abord ce bourdonnement, à peine audible. Et puis d’un coup, cette lumière. Aveuglante, terrible, annonciatrice de mort. Des explosions, partout, à droite, au-dessus, et cette lumière brûlante. Ses camarades qui prenaient leur pause au rez-de-chaussée, avaient été littéralement évaporés par une salve meurtrière. De véritables boules de feu ! Des armes à plasma, ces explosions foudroyantes ne pouvaient provenir que d’armes à plasma. La compagnie prise par surprise avait été dispersée. Les hommes n’avaient pas eu le temps de riposter. L’attaque fut foudroyante. Certains s’étaient réfugiés dans les chimères, d’autres essayaient de démarrer les tanks pour faire face à la menace. Elle était finalement arrivé, cette « menace ». Rien à voir avec de l’abstraction, se disait Perry. Une putain de menace bien réelle.
Le vent se lève. Le soldat Perry empoigne son fusil laser. Doucement, il se redresse et jette un coup d’œil au-dessus du mur à moitié écroulé. En bas, la rue principale du village est déserte. La route est complètement défoncée et de nombreuses bâtisses sont en ruine. Tout au bout du village, le Leman Russ « Gloire » n’est plus qu’une carcasse fumante, éventrée comme une cannette de Koka. Quelle saloperie est capable de percer le blindage d’un Leman Russ d’un seul tir, se demande Perry. Soudain, un bruit. Perry se jette au sol. Puis, plus rien. Probablement, un éboulement dans la maison voisine… Non ! Le même bruit sourd : Boum… Boum… Boum… On dirait une sorte de martèlement, bruit sourd et régulier… Boum… Boum… Boum… Les mains du soldat Perry recommençaient à trembler. Qu’est ce que c’est que cette merde ! Boum… Boum… Boum… Ca se rapplique par ici. Le bruit s’amplifie. Perry fixe le bout de la rue. Ca vient de là bas. Boum… Boum… Boum… Des pas ! Ce sont des pas ! Qu’est-ce que…
Au même moment, au bout de la rue principale, la silhouette élancée du seigneur Faen Ar Thetis apparaît. La couleur verte de son squelette de moelle spectrale est la marque de son peuple, le peuple des Lunes Dragons, l’Amlugisilrim. Il s’était arrêtait devant l’épave du véhicule mon-keigh. Immobile, il semblait fixer Perry. Le soldat était comme hypnotisé. La peur sûrement, mais pas seulement. Il se dégageait du monstre géant une aura de sérénité et de majesté. Que l’Empereur me pardonne, se dit-il, mais cette chose est l’incarnation de la puissance. Perry n’avait jamais rien vu de semblable et pourtant il connaissait le nom que ses supérieurs donnaient à ce colosse : un seigneur fantôme eldar, une machine de guerre capable de broyer une chimère d’un seul geste. Paraît-il qu’il incarne la fougue de milliers de guerriers…
Tout à coup, une voix : « Missile armé, sergent ! » et son écho : « FEU ! ». Perry eu à peine le temps de tourner la tête en contrebas de la rue pour voir partir le missile. Les gars du 103ème ! Un peloton d’infanterie, ils était au moins dix dont le sergent Mc Kolly, son instructeur. Ils disposaient d’un lance-missile et d’un bolter lourd. Une fraction de seconde plus tard, le missile explosa au contact du géant de moelle spectrale. Une forte détonation. Le seigneur fantôme s’écroula dans un nuage de poussière. Yeah ! Vive les gars du 103ème ! Putain… Quel tir ! Saloperie d’eldar ! Le sergent leur dit de rester prudent et qu’il avait déjà vu se relever ce genre de merd… Il ne finit jamais sa phrase. Le sergent Mc Kolly venait d’être atomisé par un tir de canon stellaire.
Faen Ar Thetis avait été touché, mais il en fallait plus pour faire taire la colère d’un millier de guerrier. Le seigneur fantôme courait déjà en direction des soldats. Ces derniers tentèrent de recharger à la hâte le lance-missile. Trop tard. Le bolter lourd crachait une pluie d’acier qui ricochait sur le squelette indestructible du colosse. Perry n’en croyait pas ses yeux, le géant tirait des salves de plasma brûlant qui vaporisait un à un les hommes du 103ème. Lorsque Faen Ar Thetis arriva devant les servants du bolter lourd, il marqua un temps d’arrêt, comme s’il voulait que Perry ne rate rien du carnage. Le tireur tenta de fuir au même moment. Un poing crépitant d’énergie s’abattit sur ses jambes, les déchiquetant aussi facilement que de la pulpe de fruit. Le dernier représentant du peloton était resté là, planté devant le monstre, attendant sa mort avec fatalité. Cette dernière arriva vite : d’un revers du poing, Faen Ar Thetis décapita le soldat qui tomba raide à ses pieds.
Perry était terrorisé. 10 hommes, se répétait-il, 10 hommes en quelques secondes. C’était à peine croyable. Pris d’un léger vertige, le soldat Perry se retint au mur écroulé et dans un mouvement maladroit, fit tomber un parpaing le long de la façade. Silence funeste… Lentement, le seigneur Faen Ar Thetis, incarnation de la colère des Rois Dragons de l’Amlugisilrim, se retourna en direction du 1er étage du bâtiment en ruine situé sur sa gauche. Il fixa pour de bon le soldat Perry. Ce dernier, résigné, regarda une dernière fois ses mains, des mains de soldat.